Au début de chaque conte, il y a généralement une formulette d’ouverture « il était une fois ». Puis vient le récit avec une situation de départ, un élément déclencheur, des épreuves à traverser, la solution et la situation finale avec à nouveau sa formulette de fin « et ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ».

Emergence Bio est une histoire sans fin que nous allons vous conter et nous comptons sur vous pour aller jusqu’au bout, pour ne pas refermer le livre car c’est votre don, votre générosité, votre cœur, votre clic sur « je participe » qui permettra d’écrire la formulette de fin « et grâce à eux, ils y arrivèrent et vécurent heureux ».

Il était une fois, dans un pays lointain, sur le plateau de Millevaches, dans la Creuse, à 900 mètres d’altitude, vivaient plusieurs individus : certains trentenaires, d’autres dans la force de l’âge, mais tous avec le même désir de travailler et de vivre sur ce territoire dans le respect des richesses environnementales. Tout a commencé en 2013. C’est une année difficile pour l’agriculteur Jouany, qui doit faire face aux évènements malheureux de la vie : le décès brutal de son père, patriarche de l’entreprise, et le départ vers d’autres horizons de son frère et associé. Jouany se retrouve seul à gérer les difficultés financières et humaines. Rares sont ceux qui le soutiennent.

Mais il a fait une promesse à son père, se battre contre vents et marais pour faire vivre l’exploitation qui compte des ateliers diversifiés : bovin, ovin, porcin, porc Cul Noir, le tout en agriculture biologique commercialisée en vente directe via l’atelier de découpe et de transformation aux normes CE.

« C’est décidé, se dit-il, si mon père voulait que je prenne les rennes de l’entreprise, c’est qu’il me faisait confiance, je dois y arriver, je vais y arriver ! ».

C’est en famille avec Sylvie (sa compagne) et Céline (sa sœur), qu’il décide alors de poursuivre son chemin. Patrick, son associé voulant jusqu’alors quitter le territoire, semble finalement vouloir rester … car Jouany a un projet !

C’est donc autours d’un verre avec Gaël (son voisin), que va naître Emergence Bio.

« Je souhaite installer une unité de méthanisation qui dégrade le fumier de mes litières et en faire un véritable engrais bio pour mes terres. Cela produira du méthane qui, brûlé dans une co-génératrice, fabrique de l’électricité et surtout, de la chaleur » explique Jouany.

Pas besoin d’en dire davantage, Gaël comprend où l’emmène Jouany. Cet ingénieur agronome rêve de s’installer en maraîchage mais il n’a jamais pu ni acheter de terre, ni penser faire pousser des légumes sur le plateau de Millevaches, si ce n’est en juillet et en août ! Il est de suite conquis par l’idée : « je peux avoir de la chaleur pour chauffer des serres et produire des légumes bio sur toute l’année pour en vivre ! » s’exclame-t-il.

« Et comme les serres doivent être proche du méthaniseur, je te louerai un hectare sur mon terrain pour que tu puisses t’installer » promet Jouany.

« Mais ce n’est pas tout, lui annonce-t-il, ce méthaniseur produira l’électricité, ce qui permettra de rembourser son emprunt, et il permettra de créer de nouvelles activités. Les filles (Sylvie & Céline) verraient ainsi l’opportunité d’ouvrir la ferme-auberge dont elles rêvent avec une boutique. Nous avons la viande, tu produiras les légumes, le tout chauffé par nos fumiers ! »

C’est ainsi que nos trentenaires se mirent à rêver mais surtout à travailler sur ce projet, complètement utopique pour les « méchants », parfaitement visionnaire pour les « gentils ».

Dans sa recherche de pertinence environnementale (transformer le fumier en digestat pour en faire un engrais bio) et de performance économique (alimenter suffisamment le méthaniseur pour assurer son remboursement et une production régulière de chaleur), Jouany se rapproche de ses voisins. Il leur propose de méthaniser leur fumier pour leur rendre sous forme de digestat.

« Mais qu’avons- nous à gagner avec ton méthaniseur ? » s’interrogent-ils.

« La matière que vous apporterez perdra 20 % de son poids mais nous vous restituerons ce poids initial. Vous aurez un fumier devenu engrais et vous gagnerez des valeurs d’azote. C’est gagnant-gagnant » leur explique Jouany.

Le Gaec de Pierre Pointe est séduit, tout comme Sabrina et Franck, éleveurs en bovin dans le village. C’est alors que va émerger une idée pour ce couple, c’est utiliser la chaleur pour se diversifier en créant un atelier de poulets de chair bio.

« Ce sera un produit de plus à vendre en circuit court mais aussi à cuisiner dans la ferme-auberge », s’exclament- ils.

Par ailleurs, Franck fut touché par le cancer il y a quelques années et les produits phytosanitaires, il n’en veut plus. Avec ce nouveau projet, le moment est venu pour une conversion de son exploitation en Bio.

Tous nos protagonistes vaquent à leurs réflexions pour faire émerger l’agriculture de demain sur le Plateau de Millevaches. Au-delà du profit tiré par chacun, une véritable complémentarité va s’instaurer.

Les filles décident même leur père, jeune retraité, à la conversion en Bio de son verger de petits fruits et de sa culture de safran.

« Allez Papa, insistent-elles, nous utiliserons tes récoltes dans nos desserts et ton safran dans notre cuisine et boutique ».

Le bruit du concept des trentenaires de Pigerolles alla de villages en villages puis dépassa les frontières du département, de la région …

Le trio Jouany, Gaël et Franck travailla sur tous les domaines, qu’ils soient politiques ou techniques. Ils n’avaient plus le choix car le projet avait émergé : Emergence Bio était né.

Toutefois, il leur manquait l’indispensable : le financement ! Mais pas question de faire machine arrière et de décevoir les personnes qui croient en leur projet, qui veulent vivre des activités qui en découlent. Il leur fallait donc convaincre les banques mais des jeunes agriculteurs sont des agriculteurs endettés alors les banques sont … farouches. Leur seul salut fut de convaincre politiquement pour avoir une chance d’être financé.

Les JA, la COM- COM, le PNR et la Chambre d’agriculture furent ravis de soutenir ce projet en mettant des techniciens à disposition pour animer des groupes de travail. Il est alors envisagé de mettre en place une plate-forme de commercialisation à échelle locale de produits bio. Cela donnerai accès à toutes les petites exploitations du plateau à la restauration collective, ce qui est actuellement impossible par manque de production individuelle et de logistique.

La relocalisation de la production et de la consommation, le développement des circuits- courts, l’économie circulaire possible grâce à la valorisation des déchets agricoles persuadent les institutions. La Draaf, la DDT, la préfecture, le Conseil Régional du Limousin, le Conseil Général de la Creuse, l’Ademe … tout le monde est curieux de voir ce que cela va donner. Mais rien ne peut voir le jour sans le financement du méthaniseur. C’est alors que l’improbable se produisit : les financeurs, convaincus de l’intérêt du projet, pesèrent sur l’accord bancaire ! Comme par enchantement, Jouany est un jeune agriculteur endetté, certes, mais avec un soutien financier qui va décider les banques de le suivre, lui, mais aussi Gaël et Frank. Et ainsi va la vie sur le Plateau de Millevaches, le collectif Emergence Bio travaille sur toute une réflexion pour verrouiller les choses, mettre en place des contrats, voir qui est prioritaire pour la chaleur, comment distribuer pour être rentable …

Gaël s’installe jeune agriculteur et devient papa, Franck et Sabrina sont en conversion bio, Sylvie suit des cours agricoles, Céline est devenue maman, Jouany gère son exploitation et son projet, Patrick est finalement resté… les serres et les poulaillers émergent de terre mais aussi le méthaniseur, sans lequel rien ne serait possible.

On travaille les dossiers et l’on gère les tracasseries résultant de la création d’un système innovant et donc basé sur aucun modèle existant. Emergence Bio devient même l’un des premiers GIEE de France et il crée son groupement d’employeurs !

Emergence Bio séduit les médias, c’est une aubaine pour la communication.

Et comme dans tous les contes, les méchants restent aigris, les gentils bienveillants et ce sont ces deux philosophies antagonistes qui font la force de nos trentenaires.

Les mois passent dans cette ambiance de travail acharné, et ce sont encore d’autres activités et logistiques qui émergent dans cette quête de développement durable : les déchets verts de la COM-COM, jusqu’alors traités dans l’Indre, à 150 km d’ici, iront dans le méthaniseur pour ensuite être redistribués aux agriculteurs. Ce sera un gain économique pour la collectivité et un bienfait environnemental.

Par ailleurs, un séchoir à plaquettes et à fourrages répondra à la demande collective : les agriculteurs valoriseront leurs récoltes sur un territoire hostile, les chaufferies collectives brûleront des plaquettes sèches et n’encrasseront plus leurs équipements. Ce séchoir permettra encore de valoriser la chaleur inutilisée l’été.

Mais malgré les prouesses, le courage, l’abnégation de nos trentenaires, la frustration demeure car le développement durable leur a couté de l’argent et il leur en manque pour aller au bout de leur démarche.

Leur quête du souci collectif et écologique les a mené à vouloir construire un bassin de récupération des eaux de pluie, pour servir de réseau d’irrigation des serres, d’abreuvement des animaux et de nettoyage des élevages.

« Des bâtiments vont émerger, récupérons l’eau des toitures » se disent-ils.

Dans le même temps, le terrassement de la ferme-auberge et de sa boutique est réalisé mais toute construction demeure en suspens.

Enfin, la création du sentier de découverte imaginé pour l’accueil des visiteurs est elle aussi en sursis.

Nos jeunes agriculteurs ont vieilli de 3 ans, ils sont encore plus endettés mais seulement cette fois, impossible de prétendre à des subventions pour constituer un apport financier face aux banques.

N’arrêtez pas de lire, ne fuyez pas, mais faites vivre l’histoire : participez au collectif Emergence Bio, écrivez votre nom sur notre mur de la ferme-auberge, faites émerger l’agriculture de demain puis venez à notre rencontre, venez voir de vos propres yeux ce que vous avez permis de faire en donnant quelques euros.

Emergence Bio, c’est un collectif d’agriculteurs qui a vécu une formidable histoire, riche et passionnante, pleine de rencontres, mais il faut désormais finir cette histoire, souvenez-vous « et grâce à eux, ils y arrivèrent et vécurent heureux ».

Il n’y a pas de héros dans ce conte, mais seulement des personnes qui veulent vivre de leur travail, qui plus est sur un territoire rigoureux. La désolation ne sert à rien, naître ici n’est pas un fléau si l’on fait preuve de discernement.

Emergence Bio, c’est un collectif d’agriculteurs soucieux de l’environnement, de la transmission à ses enfants et à vos enfants d’une agriculture durable.

Emergence Bio, c’est nous mais ce peut être vous.

Fin en attente …